« Réjouis-toi » a-t-il dit à la jeune fille, « réjouis-toi car Dieu est avec toi, réjouis-toi car, par toi, Dieu s’installe chez les siens et les sauve. »
Il n’est pas dit dans le texte,
à quelle heure est arrivé le Messager,
ni dans quel espace de la maison
ni sur l’occupation en cours !
Il a surgi là dans le quotidien tout ordinaire
Et la jeune fille, d’abord troublée, a dit : « oui ».
Le nom de la jeune fille était Marie
Elle habitait à Nazareth
Relecture du texte de Saint Luc 1
sur l’Annonciation à Marie
« Reçois de Marie son tout petit Jésus, garde le toujours avec toi,
et dans ta vie ordinaire porte le à
tous ceux que tu rencontres.
Porte son message d’humble et confiant abandon,
de simplicité et de pauvreté, de douceur et de paix,
de joie et d’amour. »
« Je découvre Lampedusa comme un lieu qui appartient
à des mondes différents;
C’est une petite île, plus proche de l’Afrique que de l’Italie.
Elle est un symbole, un message de fraternité. »
Que veulent dire ces mots de Franca, petite sœur en Italie?
A la demande de l’Union Internationale des Religieux, elle s’est rendue,
avec deux autres sœurs de congrégations différentes, à Lampedusa à la
rencontre des migrants et des habitants de l’île.
De frêles embarcations
Accueil sur la jetée
« Un jour de février j’ai été admise à faire partie du groupe
d’accueil sur la jetée où s’activent surtout les militaires.
Nous attendions 70 personnes en provenance de Libye,
leur frèle embarcation surchargée était secourue par
les gardes côtes.
L’attente était longue, j’étais très émue, je priais car l’opération
était risquée jusqu’au bout.
Hors danger
Enfin nous pouvons serrer des mains abîmées, offrir un
verre d’eau, un sourire, un mot de « bienvenue ».
Malgré la fatigue, la joie d’être tous saufs illumine les visages,
les leurs et les nôtres.
Les gardes côte, fatigués eux aussi, ont le regard serein d’avoir
sauvé des vies, j’ai de l’admiration pour eux.
Sur la place
Libérer la parole
Le lendemain nous nous retrouvons sur la place de l’église,
ou encore en petits groupes autour d’un café au « Bar de l’Amitié ».
Une des premières nécessités est trouver l’accès au Wifi afin de
rassurer les familles restées au pays.
Au bar de l’amitié
Cette démarche faite, la parole se libère, jour après jour j’écoute
leur histoire. Ils sont tous différents et tous de la même humanité,
avec le désir d’une vie meilleure, de vivre dans un pays « normal »
où comme l’un d’eux disait: « Je ne serai ni battu ni méprisé ».
Comment être proches ?
Maurizio de la communauté paroissiale aime les accueillir,
il leur fournit des petites pizzas, des cigarettes.
Mes sœurs les consolent avec des bonbons,
une association les met en lien pour envisager la suite…
Une étape
Lampedusa est un lieu de passage, premier bout de terre
ferme depuis la Libye mais pas la dernière étape de leur
odyssée, comme beaucoup le croient.
A cela ils me répondent : « mais nous sommes en vie »!
Tous les habitants se connaissent
Avec les habitants de l’île
Tous les gens se connaissent, la paroisse est fervente.
C’est important pour moi d’être ici, la beauté de l’île et
surtout l’accueil des gens est magnifique, les portes nous
sont ouvertes et ils comptent sur nous pour visiter les
personnes âgées et malades.
« Dans un monde qui bouge, nous avons nous-mêmes des déplacements à faire. Laissons-nous surprendre, osons risquer, sortir de nos sécurités pour répondre aux appels et aux événements. »
Relecture internationale de la Fraternité
« Comme Jésus, pendant sa vie humaine, fais-toi toute à tous :
arabe au milieu des arabes, nomade au milieu des nomades, ouvrière au milieu des ouvriers… mais avant tout humaine au milieu des humains. »
Petite sœur Magdeleine
Foraine avec les forains
Il y a quelques années…
Patricia souhaitait partager la vie des petites sœurs insérées dans le monde des forains :
dans son rétroviseur quelques moments de découvertes resurgissent.
Décor du stand des jeux
Stationnement à St Dié
Réaction étonnante:
« En arrivant à la fraternité foraine, je retrouve la caravane où j’avais dormi lors de mon stage de regardante ou plutôt essayé de dormir! En effet je ne connaissais pas les installations « petites sœurs ».
Branchements à l’eau
Au moment où j’ai trouvé mon lit, le matelas était attaché par des sangles,
j’ai supposé que c’étaient des sangles de sécurité alors,
quand je me suis couchée,
je me suis consciencieusement attachée afin de ne pas tomber de mon lit superposé.
Mais voilà, à chaque fois que je voulais me retourner, impossible,
les sangles tenaient bien!
Et la nuit parut longue, très longue…
Dans une situation nouvelle on a parfois de drôles de réactions.
Affiche des crêpes
Les crêpes !
Le souvenir d’un passage à Bézier fut la fabrication de mes premières crêpes sur la fête foraine. J’avais une pétoche terrible car je n’avais aucun apprentissage si ce n’est de me former sur le tas!
Des enfants m’ont surprise en train d’en faire une et ils ont vu le résultat : pas terrible!
T’en fait pas ma sœur
Alors l’un d’eux m’a dit : « t’en fait pas ma sœur, tu me la fais pour 100 balles (1 euro) et t’en fais pour eux aussi ».
« Eux aussi » arrivèrent en nombre bien sûr!
C’était l’occasion à ne pas manquer pour eux et pour moi aussi.
Je pouvais apprendre sans peur car des enfants ne font pas peur
et ce sont de bons pédagogues.
Une amie foraine :
« Notre surprise fut grande de voir des petites sœurs arriver sur la fête.
Nous ne comprenions pas pourquoi des religieuses venaient là avec une
caravane. Certains ont vu de la concurrence, mais bien vite nous avons
compris leur présence parmi nous, et pourquoi elles étaient là avec nous
forains. »
« Je voudrais que chacune de vous ait la passion de l’unité,
comme un artiste a la passion de la beauté
et un penseur de la vérité… »
Ces mots et ceux qui suivent sont extraits d’une
lettre de petite sœur Magdeleine en 1962.Ils disent
sa passion pour la rencontre des autres dans une
attitude d’accueil, de réciprocité, de dignité pour tous.
« Il faudrait que, comme un musicien souffre
de la moindre fausse note
au point d’en sursauter,
vous ressentiez douloureusement en vous
la moindre atteinte à l’unité. »
Une mission
L’unité est notre mission primordiale.
Rien ne peut être au-dessus d’elle
et tout doit lui être subordonné.
Si l’on me disait de définir en un seul
mot la mission de la Fraternité
je n’hésiterais pas une minute à crier: Unité car, dans l’unité, tout peut être résumé.
Sommet de l’amour
Nous y trouvons l’essence même de l’amour,
l’amour ne pouvant exister sans unité.
Mais nous y trouvons aussi la pauvreté, la douceur,
l’humilité, le respect de l’autre, l’oubli de nous-même
et la compréhension des autres.
L’unité est le plus haut sommet de l’amour,
le Christ avant de quitter ses disciples prie le Père: »
« Père, qu’ils soient un comme nous sommes un… Qu’ils soient consommés dans l’unité. »
« Où est le Roi des Juifs qui vient de naître? »
Question rapportée par l’évangéliste Matthieu 2, 2
et posée par des mages lors d’une démarche officielle
au roi en place.
Qui donc est ce roi qui vient de naître et qui n’est pas de sa lignée s’émeut Hérode?
Voilà une menace sur son pouvoir, alors mieux vaut éliminer ce concurrent.
Il lui donne son Esprit
Une autre lignée:
« Joseph, de la lignée de David, monta, pour un recensement, à Bethléem la ville de David »Luc 2, 4
David était le plus jeune des fils de Jessé, c’est lui que Dieu choisit
et à qui il donne son Esprit pour être roi comme Pasteur de son Peuple.
Il sera le Pasteur de mon Peuple
« Bethléem, de toi sortira un chef qui sera pasteur de mon peuple. »
Prophète Michée 5, 1
Dans la paille d’une mangeoire
Une autre royauté :
Cette royauté commence sur la paille !
Dans une mangeoire pour les animaux.
Elle se poursuivra par une annonce aux plus petits,
Ceux qui sont en marge des relations sociales :
– à l’époque, des bergers –
Dans la campagne, des bergers (*)
Un jeune du monde ouvrier dira dans une réunion : « Heureusement que Dieu est venu comme un petit, ainsi, nous aussi pouvons l’approcher. »
Elle s’étendra à l’universel, les mages viendront l’honorer
apportant des présents importants et symboliques.
« Mon royaume n’est pas de ce monde »
Jean 18, 36
Quel Royaume?
Un royaume où son Roi « fait justice aux gens écrasés par la misère, Il donne à manger à ceux qui ont faim, Il libère les prisonniers, Il ouvre les yeux des aveugles, Il remet debout ceux qui sont faibles, Il protège les étrangers »
Psaume 145
« Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ »
nous dit Saint Paul dans sa lettre Rom 13, 14
A l’approche de Noël, Geneviève me partage ses craintes
d’une fête ternies par des incompréhensions familiales.
Des attitudes incomprises et laissées dans l’ombre lors de cette même fête
il y a deux ans, resurgissent avec vigueur verbale entre membres de la famille.
Pause !
Accueillir son chagrin,
Accueillir ses peurs d’un éclatement de la famille
S’ouvrir à quelqu’un de neutre.
« Nous allons vers Noël, peut-on en rester là? Chacun vit son histoire de souffrances et de joies de déceptions et d’espérances. Chacun a ses raisons d’attitudes difficiles pour les autres. »
Exprime Geneviève
Accueillir…
Maintenir à tâtons la route vers l’autre,
poursuivre le dialogue et découvrir des
issues satisfaisantes pour chacun.
« Revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ »…
Par dessus notre vêtement d’humanité
Jésus, dans son incarnation, nous revêt de son Esprit.
Pour vous Geneviève et Claude,
et tous ceux qui cherchez à vivre à la suite de Jésus
pour un monde fraternel, de tendresse, de justice
« La nuit est avancée, le jour est arrivé gardez vivantes en vous les « armes de lumières » »(Rom 13, 12)
celles de l’Esprit d’Amour dont Dieu vous revêt.
Par la force de la liberté, de l’espérance, du courage des murs s’effondrent,
Il y a trente ans c’était en Allemagne.
Barbelés de Calais
Et aujourd’hui?
Qu’en est-il des murs encore présents sur notre terre?
Qu’en est-il de tous ces murs qui persistent dans nos cœurs et nous empêchent de chercher de meilleures solutions?
Mur de soutien ou barrage?
En bas des murs
Monique, petite sœur à la fraternité de Toulouse, et Anne
sa nièce reviennent de deux semaines à Calais, au service
des exilés dans le cadre du Secours Catholique.
Sur la route du retour nous échangeons sur tout ce que nous venons de vivre,
de ceux que nous avons rencontrés aussi bien migrants qu’acteurs généreux
du Secours Catholique et autres associations.
Un matin à l’accueil
Murs de peur, d’incompréhension
Comment partager toutes ces rencontres?
Parler de Calais suscite tant de réactions d’incompréhension,
de peur, de rejet…
Arrivent aussi les vrais questionnements, l’intérêt, l’ouverture.
Aller plus loin?
Juste à notre retour, lors d’un repas d’anniversaire chez Anne, famille et amis, nous bombardent de questions :
qu’est-ce qui se passe là-bas? Qu’est-ce que vous avez vécu, qui sont ces gens, d’où viennent-ils, pourquoi restent-ils là en face de l’Angleterre?
Alors nous parlons de Safa, Tamra, Mustafa, et aussi
de Claudine, Omid, Philippe, Mariko, Hisham…
Nous sortons d’un regard global pour des rencontres
personnelles.
De choix décidés, malgré la mort au rendez-vous,
pour espérer un mieux vivre, plus de justice et de liberté.
Les murs s’effondrent,
les cœurs se laissent toucher.
Tout en gardant une réflexion informée sur tout ce qui se trame
derrière ces migrations, nous prenons conscience ensemble que les positions politiques, médiatiques ne sont plus aussi claires dans ce qu’elles présentent sur la question.
« Faudra t-il que jusqu’à la fin des siècles, il y ait
toujours des groupes humains qui en méprisent d’autres? Là où vous aurez passé, si petit soit le passage,
il faut que vous ayez supprimé cette barrière qui sépare
les milieux, et les races. » Petite sœur Magdeleine de Jésus
C’est en décembre 2018 que Katharina arrivait à la fraternité de Munich en Allemagne.
Après quelques semaines pour découvrir son environnement, elle s’active à trouver un emploi.
Que nous dit-elle de ses premiers pas, de ses interrogations?
Dessin de Charles de Foucauld
Une tradition?
Je suis attachée à la tradition de confier la recherche d’emploi à Saint Joseph.
En même temps, j’ai ressenti un léger doute en moi : n’est-ce pas un « beau discours »?
Alors je suis d’autant plus impressionnée par la façon dont il a écouté mes souhaits.
Mon lieu de travail, une blanchisserie industrielle, est assez proche
de chez nous pour que je puisse m’y rendre en vélo.
C’est un travail régulier, 40 heures par semaine.
Dans une équipe internationale d’une centaine de personnes.
Un nouveau rythme
Ce qui m’étonne encore, c’est que je réussisse à me lever à 4 h 45.
Avoir le temps de déjeuner puis de prier avec ma fraternité est à
cette condition.
Puis la lumière du soleil levant, le concert des oiseaux sur mon
trajet sont des cadeaux pour la mise en route de la journée.
Tôt le matin les oiseaux…
La « routine »
Ma vie quotidienne est désormais tellement synchronisée :
me lever, travailler, rentrer à la maison, prier, diner… et
ensuite je peux aller dormir.
Il n’y a plus guère d’espace pour d’autres activités, la rencontre des voisins,
et les weekends s’envolent tout simplement.
Multi postes
J’ai débuté à la réception du linge sale et à la machine à plier les serviettes.
Pour le moment, je suis surtout employée là où il manque quelqu’un sur un poste.
Ainsi j’apprends beaucoup de nouvelles choses et la monotonie ne s’est pas installée
Trier le linge
En équipe
Au début j’étais un peu inquiète : pourrais-je prendre pied parmi mes collègues?
Inquiétude vite estompée par leur accueil amical.
Perçoivent-ils mon intérêt de la rencontre, ma gratitude, mon désir de les rejoindre?
Je suis surprise de la rapidité avec laquelle les uns et les autres me partagent un bout de leur vie.
J’aimerais…
J’aimerais parler croate, slovène, bosniaque ou grec et tant d’autres langues
pour échanger avec tous ceux qui viennent de ces pays.
Dans les bons moments c’est une belle variété colorée, il y a beaucoup de blagues,
de taquineries.
Dans les moins bons moments, il est simplement épuisant qu’avec toutes ces mentalités, langues, cultures différentes… nous devions trouver tant de compromis.
Fraternité de Munich
« Le travail fait partie intégrante de notre vie de petites sœurs de Jésus
nous le faisons par nécessité vitale et pour exprimer une solidarité et
une appartenance au monde des pauvres.
Les relations, au cœur de nos vies, sont marquées par le coude à coude
avec nos voisins, nos collègues, par des relations de non pouvoir,
en dépendance et solidarité. »
« C’est mon papa qui nous a élevés, maman n’était plus là. Puis, à la mort de papa, mon frère ainé nous a pris en charge. Avant de mourir papa avait dit à notre frère :
« Les filles doivent choisir leur chemin, ce sont elles qui vont décider. » Pour mon frère, et pour nous aussi les filles, c’était très important d’entendre cela.«
Des chemins inattendus
Aujourd’hui dans notre fraternité de Toulouse nous avons la visite de Jovita.
Notre petite sœur est originaire de Tanzanie.
Avec elle nous commençons par regarder où se trouve exactement son pays,
les régions où elle a vécu.
Puis un dialogue s’engage.
— Comment as-tu connu la Fraternité?
— Par le « Bulletin vert » nous dit-elle.
A cette réponse nous rions toutes car le « Bulletin vert »
est un document écrit par Petite sœur Magdeleine,
dans un contexte européen de guerre.
S’il a eu un retentissement important en France,
il n’en était pas forcément de même pour une société africaine.
Il n’empêche que c’est ce petit lien qui permit à Jovita de trouver la Fraternité.
« Quand Dieu nous attrape… qu’importe les moyens » nous dit elle.
« Je cherche, je cherche partout Celui que mon cœur aime, j’ai trouvé à la fraternité Celui que mon cœur aime. »
Adaptation personnelle de Jovita d’un passage biblique du Cantique des cantiques.
Choisir l’Unité
Qu’est-ce qui t’a fait choisir la Fraternité alors que dans ton environnement d’autres congrégations étaient présentes?
Je crois que c’est l’Unité. Oui le fait de pouvoir vivre ensemble de différents milieux, pays, cultures, cela m’a beaucoup parlé.
Et après que s’est-il passé? Comment as-tu trouvé des petites sœurs?
Avec l’aide de ma paroisse j’ai pu prendre contact avec les petites sœurs
qui se trouvaient dans une autre région.
Quand elles m’ont accueillie, elles étaient si contentes que c’était comme
ci j’étais déjà l’une d’elles!
Mais moi je venais juste voir.
Puis tu les as rejointes
— A cette époque il y avait seulement deux petites sœurs françaises sur place,
elles avaient sans doute leurs habitudes européennes, un rythme différent… Comment ça s’est passé pour toi?
Comment as-tu intégré tout ça?
— En arrivant pour un séjour, je savais que j’étais là seulement pour voir.
Il est vrai que tout quitter, sa famille, ses amis, ses sécurités…
ça déstabilise un peu, pourtant au bout de trois semaines je me suis sentie bien;
je ne faisais plus attention que je vivais avec des européennes,
c’était ordinaire.
Comme je disais tout à l’heure :
« Quand Dieu nous attrape… la grâce vient aussi et nous conduit doucement par des chemins d’accueil mutuel, de découvertes… »